Le Zirkel (S.Moinil)

 

Le «  Zirkel » ou communément appelé le « Monogramme »

Historique :

Contrairement à ce que beaucoup pensent, les corporations d’étudiants ne viennent pas d’Allemagne, ou plutôt du Saint Empire romain germanique, mais de Paris et de Bologne, les deux universités les plus célèbres du Moyen-âge.

Les étudiants y avaient l’habitude de se réunir au sein d’associations regroupant des gens originaires de la même région, les nationes. Ces nationes empruntèrent nombre de rites aux corporations qui fleurissaient un peu partout au Moyen-âge. Comme pour tout groupement fermé, le nouveau venu était soumis à un certain nombre d’épreuves (sauf à Bologne) qu’il devait subir avant d’entrer dans la nation. Ces associations avaient pour but essentiel d’accueillir chaleureusement les nouveaux venus, tirés de leur terre natale. De les guider et de leur faire découvrir leur nouvel environnement.

Un pas déterminant fut franchi au XVIè Siècle en Allemagne dans les universités fraichement converties à la réforme, le luthéranisme. Les nationes, d’origine latine, arrivèrent dans ce pays sous une forme à peu près semblable. Regroupant également des étudiants provenant de la même contrée, elles prirent le nom de Landsmannschaften. Là aussi, elles s’inspirèrent des corporations, puisqu’elles adoptèrent, comme celle-ci, des signes distinctifs, rubans, locaux et règlements. Des Comments ( savoir faire et se comporter). De même, l’étudiant pour se distinguer du peuple, prend l’habitude de porter l’épée. Et par conséquent adopte la pratique des duels.

En Suisse, en 1547, le port de l’arme est interdit. En 1654, les Landsmannschaften sont interdites en Suisse et le sont en 1819 en Allemagne. Je ne m’étendrai pas sur les corporations allemandes, celle-ci étant postérieures au Suisses.

Néanmoins, dans ces deux cas, les Landsmannschaften ne disparaissent pas, elles continuent d’exister secrètement avec beaucoup moins de membres. Lors de correspondances, ainsi que lors de la rédaction des PV de réunion, les noms des membres sont remplacés par le Zirkel suivi des initiales et/ou grade des membres cités. Ces corporations par leur éveil politiques transmis aux membres devenaient un risque pour l’état et dès lors furent bannies.

En 1763, les Landsmannschaften réapparaissent officiellement en Suisse enrichie sous l’influence conjuguée de la Franc-Maçonnerie et l’Aufklärung.

Kant (1724-1804) exprime, en 1784, dans une définition devenue célèbre, l’essence même du mouvement: « L’Aufklärung, c’est la sortie de l’homme hors de l’état de tutelle dont il est lui-même responsable. L’état de tutelle est l’incapacité de se servir de son entendement sans la conduite d’un autre. On est soi-même responsable de cet état de tutelle quand la cause tient non pas à une insuffisance de l’entendement mais à une insuffisance de la résolution et du courage de s’en servir sans la conduite d’un autre. Sapere aude! Aie le courage de te servir de ton propre entendement! Voilà la devise de l’Aufklärung. »

Donc, pour les fuchsen, ceci veut dire : «  Réussir à quitter son état de servitude intellectuelle vis-à-vis d’un être supérieur. L’homme ne peut se dépasser qu’en prenant sa vie à pleine main, cela demande du courage ET de la résolution. Le seul non-responsable de cet esclavage intellectuel est la personne qui n’a pas les outils pour se libérer ».

Ces quelques lignes sont symptomatiques d’un glissement du théocentrisme vers l’anthropocentrisme. Elles revalorisent l’homme, le rendent conscient de ses potentialités, se veulent libératrices et constituent un appel à l’émancipation, émancipation de toute tutelle, celle des autres hommes, en particulier d’un guide spirituel, ou d’un directeur de conscience comme c’était la mode à l’époque dans les cercles de la bonne société, mais aussi celle d’un Dieu intervenant, selon une conception piétiste et providentielle, dans les moindres actions humaines, omniprésent dans la vie de chacun et auquel il faut s’en remettre pour toute décision. Piétisme étant une branche controversée du protestantisme, ou tout comme les catholiques, ils considèrent le baptême de l’enfant comme étant un sacrement. (A l’inverse de Calvin, entre autre…)

En 1810, les Landsmannschaften qui faisaient respecter de façon tyrannique le Comment sur les universités et qui y exerçaient une véritable hégémonie, prirent progressivement les noms de Kränzchen puis de Corps. Le critère d’admission n’était plus une appartenance régionale mais était basé sur la personnalité de l’impétrant.

Le Zirkel

Maintenant que nous avons compris le coté nécessairement hermétique du Zirkel, il est temps d’attaquer l’essence même du Zirkel.

« Zirkel » signifie en allemand « cercle » sous-entendant directement l’idée de compas. Le compas, crée le cercle, l’espace corporatif. La règle et le compas sont associés. La règle étant le rappel du Comment.*

Au départ, le zirkel reprenait en calligraphie les premières lettres de la devise de l’Ordre. Cet ensemble de lettres formaient à leurs tours la première lettre de l’ordre.

Par exemple :

VIVAT CIRCULUS (Vive le Cercle)

FRATRES CONVICTI VIVANT (Vive les frères associés)

CIRCULUM FRATRUM ET VIVANT (Vive le Cercle de la Confrérie)

Ensuite le Zirkel reprit d’une façon plus répandue les lettres V, C et F pour vivat, crescat, floreat.

Dans notre corporation tout comme dans beaucoup d’ordres belges, deux lettres sont ajoutées pour former la phrase USVFC !

Attention, ici, je vais changer la façon de lire le monogramme corporatif en suivant le mode lecture rencontré lors de mes différentes recherches.

Turnerschaft Alania

VBSt Lysistrata

Germania

Teutonia

Arion & Altpreussen

Brabantia Bruxelliensis

Mais que veut dire ce point d’exclamation… ?

Plusieurs théories existent, je vais vous les donner, et vous laisserai faire votre choix.

  • Il est dû à la construction de la phrase latine, un subjonctif soulignant une exclamation. Néanmoins, la ponctuation n’existe pas en latin…
  • Il est présent si le membre est actif, les membres ne venant plus, ne le placent plus à coté du monogramme.
  • Il signifie ETERNAM, pour toujours.
  • Il signifie que la corporation est armée.
  • Idem avec la variante suivante, est armée si le point se trouve dans la boucle de droite.
  • Et enfin, la solution la moins usitée mais qui me semble après réflexion la plus logique, le point d’exclamation représente la règle à coté du compas. Zirkel und Regel (voir plus haut *). En compagnonnage, la règle est réservée au maître responsable du chantier, il est le seul détenteur de l’étalon de mesure référentiel. Chez nous, nous sommes tous dépositaire du savoir corporatif, à nous de l’utiliser avec sagesse, désir de connaissance afin de construire au mieux notre chapelle intérieure pour enfin participer au à l’édification du temple du commun.